Literature In Los Angeles

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ANTHONY

In POETRY on July 18, 2011 at 3:35 am

Poesia di Liliana Isella.

Coccinelle in coda nella notte
Dagli occhi giallo fluorescente
Questo aspettare casa interminabile.

Santa Monica tramonta
Verso le punte dei tuoi alberi
Fra la brezza del tuo portico
Sul cotto dei tuoi passi.

Volteggia la nostra favola
Dentro la magia dei tuoi respiri
Nel lino delle tue notti
Tra gli anelli delle mie preghiere.

Che il vento te la possa portare
In questo orizzonte di fuoco
Oltre questo muro di nuvole
Su questo oceano di ghiaccio.

E che la nostra canzone torni a suonare
Fra note di malinconia e sapone
Per questo tramonto di santi e perdenti.

Poem by Liliana Isella.

Photo by Max Furia.

SLEEPLESS

In NO SPEAK ENGLISH on July 13, 2011 at 1:00 pm

Photo by Max Furia

Sleepless. Le mot lui vient en anglais et semble à lui seul, par sa sonorité, résumer le silence qui plane dans la chambre, lumières éteintes, alors qu’allongée elle en observe le plafond. Les reflets de la rue, jamais déserte comme toutes les rues des capitales, s’animent par moments au dessus d’elle lors du passage d’une voiture, mais sans bruit, la laissant seule dans l’isolement sonore de l’appartement et de cette chambre, que d’épaisses fenêtres protègent de l’extérieur.

Sleepless. Presque un palindrome. Une ironie du sort, sleep- less. Alors que le sommeil, qui  tardait à venir, a fini par l’abandonner complètement.

Elle a d’abord posé son livre sur la table de chevet, a éteint la lumière et fermé les yeux pour se forcer au plongeon dans l’inconscience d’une nuit de repos. Elle s’est couchée sur le ventre, faisant de la couverture et des draps remontés jusqu’aux oreilles une chrysalide, ajoutant ainsi une couche supplémentaire de silence au silence déjà prégnant de la pièce. Pour appeler le sommeil, elle a décortiqué les événements de la journée, s’attardant sur chaque détail, n’a pas trouvé de quoi se distraire et a donc puisé plus loin dans le temps, cherchant l’épisode, la fable à se raconter, un souvenir à choisir pour en redessiner les contours.  

Eté dernier, avec Max, en Provence verte. La maison d’hôtes était exquise, décoration soignée un peu cliché mais chaleureuse: les bouquets de lavande séchée dispersés dans chaque pièce, le mobilier en bois peint de blanc, les draps qui sentaient bon le linge séché au soleil, les confitures faites maison pour le petit déjeuner et la nappe Souleiado. La fenêtre de leur chambre donnait sur le jardin, les branches d’un chêne centenaire venaient en caresser les vitres. On pouvait entrevoir la piscine, plus loin, perdue dans le gazon vert du parc. Une matinée passée à lire sur les chaises longues, Max dans l’eau bleue chassant une guêpe de la main avant de plonger, le jardinier qu’il avait fallu convaincre de ne pas tondre la pelouse ce jour-là; l’humour de Max: «Mais laissez-là donc pousser, cette herbe ! Jamais gazon ne vous aura été plus reconnaissant. Regardez: à la façon dont elles se penchent, les pâquerettes vous remercient déjà». Et, ainsi, préserver le calme absolu de leur havre de paix.

Les souvenirs demandent à être réconciliés, parfois, et il faut toute la patience d’une nuit sans sommeil pour les raccommoder. Il faut tirer un à un les fils de l’édifice immense pour ramener à la vie ce qui n’est plus. Elle s’y était dédiée avec application.

Mais le corps éveillé, se sentant prisonnier de cette immobilité larvaire, l’avait rapidement rappelée à l’ordre. Se tourner et se retourner dans les draps, se recroqueviller puis se détendre, chercher la posture idéale et ne pas la trouver. L’agitation des membres fébriles. Se concentrer alors sur chaque articulation, sur les jambes puis les bras, essayer d’en sentir les extrémités, les mains, les doigts, les phalanges et enfin les ongles. Comme s’ils avaient une vie propre, mobile, autonome. Chercher ensuite le souffle et respirer, lentement. Se fixer sur la respiration. Ne penser à rien d’autre qu’au corps, à ses parties mobiles et au souffle.

Mais la pensée, agitée par le sommeil qui ne vient pas, finit toujours par se fissurer. Affleure alors la peur de ne pas arriver à dormir, de ne plus jamais arriver à dormir, l’enchainement d’une nuit sans sommeil et puis d’une autre, le cauchemar éveillé des jours qui se succèdent sans repos. On peut mourir d’insomnie, oui, je l’ai lu quelque part, enfin c’est ridicule mais c’est bien arrivé à ce type aux US, ah, ces américains, toujours les premiers quand il s’agit d’inventer des histoires abracadabrantes mais tomber dans leur piège, ça non, on ne meurt pas d’insomnie et surtout je ne mourrai pas d’insomnie; merde, c’est ridicule de penser ça, je déconne, là. Puis, l’accélération des battements de cœur, et les premières sueurs froides. L’agitation qui se transforme en angoisse réelle, palpable.

Elle avait donc fini par ouvrir les yeux.

Provence by Unknown Artist

Les voilà grandes ouvertes, ses pupilles, scrutant le plafond et les reflets étirés venant de la rue. Bleutés par moments, comme les flots d’une eau mouvante au-dessus d’elle, une projection de la piscine de Provence;  je vais me noyer, c’est ça, toute cette eau va finir par m’atteindre, m’envelopper, s’insinuer dans mes narines, ma bouche, serpenter jusqu’à mes poumons, l’air va faire place au liquide. Elle croit voir  le corps de Max maintenant,  flottant seul et flasque dans l’eau bleue d’un bassin vide au dessus d’elle. Au premier souvenir se superpose un second, plus récent: celui d’un message lu par hasard qui, confiant, appelait Max au départ, juste quelques lignes, prends tes valises je serai là je t’attends et les dates, qui coïncidaient; Max qui chasse la guêpe d’une main avant de plonger, Max qui se veut défenseur de leur havre de paix provençal et qui, au même moment, à quelques minutes près, répond ailleurs oui mon amour je viens je te rejoins je t’aime. Et, subitement, comme si l’idylle s’était fissuré d’un coup, revivre le souvenir avec une lumière nouvelle et réaliser qu’il y avait des ronces autour de la piscine, dans ce jardin mal entretenu, et qu’à bien y regarder le fond du bassin était visqueux et les parois recouvertes d’un film verdâtre, végétal, insalubre; à la surface de l’eau flottaient des mouches inertes, des fourmis, des cheveux. Une eau mousseuse et sale s’agglutinait dans les coins, le filtre était cassé. Et la guêpe chassée d’une main par Max avait agonisé plus loin, sur le rebord du bassin, remuant ses ailes de quelques soubresauts lorsqu’ils avaient quitté les lieux pour rejoindre leur chambre.

Refermer les yeux. Se noyer dans cette piscine ou le noyer, lui, noyer le mensonge. Avoir la force de plonger la tête sous l’eau et ne plus la remonter à la surface. Sentir la pression fluide qui rapidement chasse l’air, devenir entièrement liquide.  Je vais me noyer dans ma chambre,  je vais me noyer dans ma chambre, je vais me noyer dans ma chambre.

Les mains moites, elle se résous à attraper le flacon de somnifères posé sur la table de chevet.

Drops by Max Furia

L’empreinte glacée d’une goutte d’eau tombée sur sa joue la tire de son sommeil. Elle ouvre les yeux avec peine, aperçoit le flacon de somnifères vidé de ses cachets sur la table de chevet, jette un coup d’œil à la fenêtre baignée de soleil; il doit être 13 heures.

Elle scrute enfin le plafond, où s’étire une grande tache sombre, humide, poreuse. Des pas résonnent dans le couloir, Max ouvre la porte de la chambre, jette sa valise dans un coin de la pièce et s’exclame «Encore au lit! Tu n’as pas entendu les sirènes? Il y a de l’eau partout au 3ème étage. Notre voisine du dessus s’est suicidée; elle s’est coupée les veines dans sa baignoire.»

Story by Alice Sienna.

Photos in black and white by Max Furia.